samedi 6 septembre 2008

Vocation à

On trouve de plus en plus souvent le verbe "avoir vocation à", au lieu de "être voué à", "destiné à"...

Vous imaginez Guy Marchand chanter la fameuse chanson :
"Vocation à, toi et moi nous avions vocation à..."

mercredi 4 juin 2008

Nouvelle recherche : les objets à la con

En plus des mots et des expressions, le Cesicon se devait de recenser des réalisations qui relèvent de la "connologie appliquée" : produits et objets redondants, ou franchement inutiles, nés de je ne sais quelle stratégie marketing, ou dans le cerveau d'un inventeur en manque d'inspiration...
Les deux premiers produits repérés :
- Le Fanta sans bulles... Il fallait y penser :-)
- Les cahiers d'exercices d'été Passeport, "pour adultes" : avec des mots fléchés, sudokus, etc. (apparemment rien d'inconvenant...)
Envoyez vos observations !

mardi 6 mai 2008

Impulser

Mot "à la con" déjà ancien, utilisé pour imposer, inspirer, encourager...

vendredi 25 avril 2008

Dédié

De plus en plus utilisé au sens de spécialisé, réservé : une installation, un système dédié à quelque chose, ou dédié tout court.
Ca vient de l'anglais, bien sûr...

mardi 22 avril 2008

Les adverbes vides

Cela ne date pas d'hier, mais les phrases sont terriblement alourdies par toutes sortes d'adverbes inutiles, qui remplacent le mot "oui", ou tout simplement rien du tout :

"Absolument", "tout à fait", "effectivement", "en effet", etc.

lundi 21 avril 2008

Couac

Cette fois, il ne s'agit pas d'un mot "à la con", mais d'un vrai phénomène de la communication politique actuelle.
Un article de Daniel Schneidermann, dans Libération, le 18 avril 2008 :



Le couac, première approche scientifique

C’est bien pratique, d’avoir découvert ce mot : couac. Il faut, pour une fois, remercier les médias de cette intuition majeure de la politologie contemporaine. Elle permet de ranger toute une série de phénomènes, peu explicables individuellement. Et cette catégorisation ouvre de vastes perspectives à la recherche fondamentale sur le phénomène, comme sur les grandes découvertes récentes de la recherche sur la matière (son quasi-homonyme le quark, par exemple).
Le couac peut se définir comme la composante élémentaire de la pratique politique française, en ce début du XXIe siècle. Première constatation, le couac surgit d’un chaos : absence de perspective, de conviction, de plan d’ensemble, de désir de pacte social. S’il suscite effroi, jubilation, tumulte, il semble décourager la pensée. Comme si sa matrice de chaos décourageait symétriquement toute pensée ordonnée. Le couac est une faille, une fissure. D’autant que le couac appelle le couac, rajoutant du tumulte au tumulte. Comme nombre de produits médiatiques (affaires de «voile à l’école», agressions par des pitbulls, incendies de voitures, banderoles de stades, congélation de bébés, etc.) le couac semble s’autogénérer. Au point que l’on peut évidemment s’interroger sur la responsabilité de l’observateur extérieur, dans le déclenchement du couac. Sans intervieweur pousse-au-couac, le couac existerait-il ?
Sur l’origine du couac, impossible pourtant de ne pas s’interroger sur le rôle d’un élément déclencheur nommé Sarkozy. Partout où se trouve du sarkozysme, s’observe du couac, et réciproquement. Pour autant, ne s’agit-il pas d’une coïncidence ? Peut-il exister du sarkozysme sans couacs ? Des couacs hors le sarkozysme ? Et s’il en est la source, en est-il la source volontaire, ou involontaire ? «Sarkozy tente de remettre de l’ordre» titrent par exemple les éditorialistes, qui semblent donc conclure implicitement à la non-responsabilité de Sarkozy lui-même dans le terreau sarkozyste du couac. Mais pas de conclusion hâtive, ni dans un sens ni dans l’autre. La science progresse pas à pas. C’est sa grandeur.
Admettons un instant l’hypothèse de travail d’une responsabilité personnelle du président Sarkozy dans la naissance du couac. Ce n’est qu’une hypothèse. Personne n’a réussi à localiser exactement la source de tous ces couacs sur la carte cérébrale de Nicolas Sarkozy. Il faut donc postuler que cette origine se trouverait dans un lieu d’extraterritorialité qui défie tous les cartographes. Il faut imaginer une Atlantide mentale, une autre dimension, isolée du monde extérieur par des protections inexpugnables. Une grotte à l’écart de la rumeur du monde. Un trou noir, pour en revenir aux mystères de la matière. Enthousiasmantes perspectives.
Le chercheur ne pouvant s’exclure de sa propre recherche, observons nous aussi, simple spectateur, en train d’observer un couac. Et commençons par admettre que nous en retirons du plaisir. Ce plaisir est d’abord un plaisir de la confirmation, le plaisir de l’enfant à qui l’on raconte sans cesse la même histoire, et qui guette l’arrivée du loup.
On regarde un ministre ouvrir la bouche, on sait que va en sortir un couac. Que Roselyne Bachelot s’installe au Grand Jury de RTL-LCI, que l’on contemple en direct (presque au ralenti) le journaliste Pierre-Luc Séguillon lui poser une fois, deux fois, la question de l’éventualité du déremboursement des lunettes par la Sécurité sociale, on entend l’interrogée répondre «la question est posée», et l’on sait que l’on est en plein futur couac. On regarde la ministre Morano s’installer sur le plateau de France 2 pour répondre à des questions sur la diminution des allocations familiales, on ferme les yeux, on écoute simplement cette musique aigrelette de petite fille prise les doigts dans le pot de confiture, et l’on sait que l’oratrice est en train de vivre son initiation au couac (ce qu’elle ne sait pas encore).
Ce plaisir est enfin un plaisir du mystère. Dans les premiers instants de la naissance du couac, la réaction est d’incrédulité. On se dit : ce n’est pas possible, ils ne vont pas s’en prendre à la carte familles nombreuses de la SNCF sans avoir prévenu les associations familiales (comme on se disait hier, ce n’est pas possible de lancer cette idée de parrainage d’un enfant victime de la Shoah sans avoir consulté Simone Veil, assise à côté de Sarkozy au dîner du CRIF, ce n’est pas possible de supprimer la pub à la télé sans avoir réfléchi à un financement de rechange, ce n’est pas possible de lancer le Grenelle de l’environnement sans avoir mesuré les risques d’opposition de sa propre majorité, etc.). Cet aveuglement défie l’entendement. Il fait partie de la mystérieuse beauté du couac.

dimanche 20 avril 2008

Non- (préfixe)

A l'image de la fameuse novlangue d'Orwell, le langage contemporain fait un large usage des préfixes modifiant le sens des mots, ce qui permet de se passer de nombreux mots existants : "super-" ou "sur-" (superlatif : "surréagir", "survaloriser"...), ou encore "non-" pour exprimer la négation.
Le préfixe "non" existe déjà dans certaines expressions techniques difficilement remplaçables : "non responsabilité" d'un accident, entreprise "non habilitée" au ministère de la Défense...
Mais le "non" a tendance, à la faveur de la paresse intellectuelle, à envahir le langage : on parle d'un "non-événement", de personnes "non volontaires", ou encore des jouets (Barbie ou Kiki) vendus "non habillés"...
"Quelle belle chose, que la destruction des mots !", s'exclamait un personnage du roman 1984...

samedi 19 avril 2008

Ultime

Cas typique - et agaçant - de "mauvais franglais", c'est-à-dire d'un mot français en apparence, mais dont le sens français d'origine tend à être supplanté par le sens anglais - ultimate : suprême, définitif.

C'est dans les gènes

Expression utilisée pour dire qu’on est semblable à son père, à sa famille, aux habitants de sa région ou de tout autre groupe. Mais elle est également utilisée quand on témoigne de qualités que n’ont ni les autres membres de sa famille, de sa région ou de tout autre groupe.
En somme, l’expression permet de démontrer tout et son contraire, et elle est utilisée simplement quand on ne sait pas.

Emblématique

Adjectif très à la mode, signifiant "typique", "représentatif", et servant comme la plupart des mots du lexi-con, pour tout et n'importe quoi.

N'hésitez pas à envoyer en commentaire des phrases tirées des médias par ex., surtout si elles sont marrantes...

dimanche 13 avril 2008

Visionner

Au lieu de regarder (une cassette vidéo, un DVD, une émission de télévision...)

Coacher

Comme vous le savez, le coaching est une forme d'entraînement personnalisé bien particulière : le terme anglais peut donc avoir son utilité.
Mais actuellement "coaching" et "coacher" font un tabac, au sens de conseiller, accompagner... y compris le verbe "se coacher" pour s'organiser, se prendre en main.

Le jargon d'entreprise, plus vrai que nature

Pratiquez le langage managérial - certes dans une version un peu caricaturale - en regardant un petit roman-photo, concocté avec humour par Le Journal du net .
Merci à eux (et à la collègue qui m'a donné la référence), c'est drôle et instructif - y compris sur les rapports sociaux à l'oeuvre : une source connologique (presque) de première main !

Dépenses somptuaires

L'adjectif "somptuaire" signifie "relatif aux dépenses" ; c'est donc un très ancien pléonasme, causé sans doute par la proximité avec l'adjectif "somptueux".

Ex. "Vos dépenses somptuaires ont des allures africaines" (Michel Audiard - "Les Tontons flingueurs", 1963).

Générique

Employé souvent à la place de "général".

samedi 12 avril 2008

Au jour d'aujourd'hui

Belle tautologie.

Un collègue et néanmoins ami m'a suggéré plusieurs autres tautologies liées au temps :

"De tout temps" ;
ou encore l'association de deux morceaux choisis : "De quoi demain sera-t-il fait ? Seul l'avenir nous le dira". Enoncé qui se suffit à lui-même, non ?

Revoir sa copie

Cette métaphore scolaire est curieuse, car les élèves "revoient" très rarement leurs copies : si déjà ils les relisaient avant de les rendre...

Ex. "Le ministre doit revoir sa copie" (expression systématiquement utilisée par les journalistes lorsqu'un ministre, souvent de l'Education nationale, fait une proposition mal reçue par l'opinion publique, ou d'autres politiques) à la place de : "Le ministre a fait une connerie et, devant les réactions, doit revenir en arrière".

Candidater

Parfois utilisé (dans l'Education nationale notamment) pour : poser sa candidature.

Espace

Pour : lieu.
Donne une impression d'étendue et de liberté à des endroits en général fermés et surveillés...

Ex. "espace forme", "espace fumeur" ou l'inénarrable "espace détente" dans les entreprises.

Recadrer

Pour : réprimander, engueuler.

Conservatisme

Taxer les adversaires de représentants du ou des "conservatismes" permet de les neutraliser sans peine dans les débats.

Acteur de

"Etre acteur de" pour "faire".

Variante : "rendre ... acteur de", c'est-à-dire faire reposer sur quelqu'un une charge ou une responsabilité désagréable, en le culpabilisant au besoin.

Prendre en otage

Appliqué bien sûr aux grèves des fonctionnaires, ou des salariés d'entreprises publiques.

Grogne

Vedette du langage journalistique. Les revendications et les actions collectives sont ainsi assimilées à des cris d'animaux...

Létal

De l'anglais "lethal", au lieu de mortel : ça fait tout de suite moins peur... et une arme "non létale" devient presque sympathique.

Sans tabou

Expression qui, à l'instar de "sans langue de bois" ou "pas politiquement correct", précède en général des propos plus ou moins choquants...

Planète

Terme superfétatoire désignant une activité, un domaine : la "planète foot", la "planète finance"...

On utilise aussi "paysage".

Surfer sur

Au lieu de : s'appuyer sur, profiter de.

Début avril 2008, lors du débat à l'Assemblée sur une motion de censure, le Premier ministre François Fillon a utilisé l'expression, en prononçant "sürfer"... verbe, on en conviendra, un peu surfait.

Logiciel

Ce terme informatique est parfois utilisé pour : point de vue, approche...

Ex. "Changer de logiciel"...

Audible

Utilisé au lieu : acceptable, tolérable.

Voir : Lisible.

Lisible

Au lieu de : clair, compréhensible.

Adjectif proche : Audible.

Explicite

Utilisé à la place de : clair.

Le verbe "expliciter" remplace souvent "expliquer".

En capacité de

Au lieu de : capable de.

Expression très appréciée des politiques.

Problématique

Comme nom féminin, utilisé au lieu de : problème, question, enjeu...

Une vedette du langage technocratique.

Méthodologie

Pour méthode.

Il existe d'autres mots en "-logie" (ou des adjectifs en "-logique"), utilisés à la place d'autres mots plus simples :
Technologie, au lieu de technique
Sociologie, au lieu de situation sociale...

Gérer

Une vedette, déjà ancienne, mais qui a toujours du succès, car elle peut servir pour toutes les activités, en toutes circonstances.

"Elle gère bien son physique, mais elle a du mal à gérer ses sentiments." ("Le bal des casse-pieds", Yves Robert).

Acter

Utilisé pour : décider, enregistrer.

Voir : Valider.

On peut noter aussi l'expression "dont acte", d'origine juridique, et qui ne sert pas à grand-chose dans la vie courante, sinon à clore une discussion en signifiant que l'on a pris bonne note des faits, et que l'on saura s'en rappeler ultérieurement.

Enorme

Employé systématiquement pour tout ce qui est extraordinaire, surprenant...

Booster

Pour stimuler, pousser, amplifier.

Restaurer

Vient du jargon anglo-informatique ; utilisé pour recommencer, redémarrer.

Coordonateur

Créé à partir du verbe "coordonner" ; a tendance à remplacer le correct "coordinateur".

Impacter

Une vedette !
Utilisé pour : avoir un effet sur, modifier - en particulier dans le monde économique : tel événement a "impacté les résultats" d'une entreprise ; la crise américaine risque d'impacter la croissance économique française...

Valider

Pour autoriser, confirmer, entériner.

Générer

Au lieu de créer, entraîner.

vendredi 11 avril 2008

Finaliser

Encore du franglais décadent... (substituer au sens français le sens du mot anglo-américain d'origine)
Au lieu de terminer, achever.

Initier

"Mauvais franglais" ; utilisé de préférence à démarrer, lancer, débuter.

Supporter

Terme de "mauvais franglais" (qui remplace le sens français par le sens anglais) ; utilisé au lieu de soutenir, encourager.
Très populaire parmi les sportifs.

"Rien de ce qui est con ne nous est étranger."

Débuter par un alexandrin manque de sobriété, mais telle sera la devise du CESICON, Centre de Science Connologique.

Dans la lignée de l'Oulipo (Ouvroir de littérature potentielle) de Raymond Queneau et alii, du célèbre Dictionnaire des idées reçues de Flaubert, ou de la moins connue mais inégalable Exégèse des lieux communs de Léon Bloy, je vous propose donc de participer à ce salutaire recueil de Mots à la con, selon le titre d'un ouvrage de Pierre Merle, qui a inspiré la création de ce blog - des mots pas forcément détestables mais essentiellement inutiles.
La méthode est simple : chacun envoie un message, avec en titre un mot ou une expression, qui seront retenus et archivés par ordre alphabétique, sauf si des commentaires les contestent - car il est important qu'il y ait con-sensus, dans notre petite communauté...
D'autres messages pourront porter sur des sujets d'actualité, des anecdotes, des lectures...
Un autre principe à affirmer ici, c'est qu'il ne s'agit en aucun cas de mépriser ni de haïr la "connerie", et ses représentants. Il est en effet facile de traiter les autres de cons, ce qui revient souvent à se montrer intolérant ou à stigmatiser les plus vulnérables : les maladroits, les complexés, les sans-grades, les peu instruits, les “malcomprenants”… Cependant, comme pour la normalité et la déviance, la différence entre intelligence et bêtise est plus un continuum qu'une frontière nette.
En mars dernier, l’hebdomadaire Marianne a consacré à la bêtise un bel article, qui résume bien mon état d'esprit à l'heure de la création de ce blog, et dont je reproduis ici les principaux extraits :

SUBLIME BETISE !
Par Christian Godin

La prolifération, depuis un an, d’ouvrages sur la bêtise pourrait donner à penser qu’un nouveau spectre hante sinon l’Europe du moins la France. Belinda Cannone, romancière et essayiste, a publié l’an passé un vif et réjouissant essai romancé (La Bêtise s’améliore) dans lequel elle croque des personnages compactés dans leur certitude d’être au top par leurs manières d’être, d’agir et de parler. Déjà Flaubert avait soupçonné ce désastre : et si la bêtise était du côté de la culture ? Les personnages de La Bêtise s’améliore avaient par leur naissance et leur éducation la chance d’être subtils et perspicaces : ils sont lourds et malvoyants avec leurs mots lancés comme des slogans publicitaires.
D’autres ouvrages, traitant apparemment du même sujet, sont loin d’avoir la même élégance. Avec ceux-là, ce sont carrément “les cons” qui sont pointés : Comment supporter les cons de Francisco Gavillan, Vivre avec des cons, de Tonvoisin Depalier, deux livres parus ce mois-ci, Travailler avec des cons, de Tonvoisin Debureau, publié l’an passé, et last but not least, Mort aux cons, de Carl Aderhold. (…) D’outre-Atlantique nous est venu un Objectif zéro-sale-con (…) C’est une tendance nouvelle dans les sciences (!) du management : si l’atmosphère est plombée au bureau, si la productivité flanche, ne regardez ni du côté de la société ni de celui de l’entreprise (la structure hiérarchique, l’organisation du travail, la compétition, rien que des gros mots), non, dénichez plutôt les sales cons qui sont la faute de tout.
L’effondrement du marxisme aura emporté avec lui l’idée élémentaire de l’aliénation. Comme la société et les classes ne sont plus censées exister, les individus restent seuls responsables de ce qui leur arrive. Les individus, c’est-à-dire les autres, d’où l’insistance mise sur leur “connerie”. (…) La connerie coûte cher, très cher aux entreprises, donc à l’économie nationale (…) Les couvertures de ces livres font signe de manière étrange : une tasse de café renversée sur un bureau, une tartine tombée côté confiture. Comme si c’était être bête que d’être maladroit !
(…) Comme les causes ne sont pas analysées ni même véritablement cherchées (on n’est pas insupportable au travail sans raison, de même qu’un élève n’est pas insupportable en classe sans raison), la plupart des livres de cette paralittérature prennent les effets pour des causes : si vos conditions de travail sont détestables, c’est du fait de vos collègues qui vous harcèlent… (…) Après cette littérature de cafardage, le Bréviaire de la bêtise du philosophe et romancier Alain Roger plongera le lecteur dans un vrai bain de jouvence : (…) l’idée de base d’Alain Roger est que la bêtise fait un usage abusif et intempestif de ce que la logique classique appelle le principe d’identité : une chose est ce qu’elle est, on est comme on est. La bêtise n’est pas en-deçà de la raison, mais dedans, en plein dedans. Elle ne pêche pas par défaut mais par excès ; elle est une raison suffisante (au sens de fermée sur elle-même, ”au 1er degré”… - E.B.) (…) On l’aura compris : la bêtise dont traite Alain Roger fait rire, à la différence de la “connerie” qui exaspère. (…)
Reprenons la question : de quoi cette fixation sur la bêtise est-elle le symptôme ? La réponse ne serait-elle pas du côté de la crise du lien social ? Deux siècles après la Révolution, nous ne sommes toujours pas persuadés que les hommes sont égaux. Dénoncer la bêtise est une manière détournée de reconstituer une hiérarchie entre les esprits, nobles d’un côté et vils de l’autre (…) : la bêtise, c’est ce que nous détestons chez les autres.